Vous êtes à la tête de la direction immobilière d’AXA France depuis 23 ans, qu’est-ce qui a changé dans votre métier et dans votre manière de le percevoir entre vos débuts et aujourd’hui ?
Quand je suis arrivée, tout le monde avait un bureau attribué. On était plus de 10.000 collaborateurs donc je vous laisse imaginer les surfaces nécessaires et le coût que cela pouvait représenter. Il y a plus de quinze ans on s’est dit qu’il fallait changer de modèle. On a donc travaillé à réduire le nombre de postes, en ayant une réflexion plus large sur l’environnement et les modes de travail. En interne, tout le monde s’interrogeait sur l’impact d’une telle approche et sur l’accueil qui lui serait réservé... Nous avons été pionniers en matière de télétravail et avons une organisation de travail hybride, fondée sur une culture de confiance. Nous sommes aujourd’hui à 6 postes pour 10 collaborateurs, avec beaucoup plus d’espaces ouverts, collaboratifs et flexibles. Au bureau, les salariés échangent, collaborent et ça, c’est super pour la dynamique, l’ambiance, le moral des troupes !
Qu’est-ce que les nouvelles habitudes de travail modifient pour les acteurs de l’immobilier ?
L’immobilier est devenu essentiel pour les entreprises. Avant c’était un « mal nécessaire ». Il fallait trouver des murs, des bureaux pour que les collaborateurs viennent travailler chaque jour. Aujourd’hui, les propriétaires ne peuvent plus ignorer leurs utilisateurs, qui sont perçus comme de vrais clients. Le dialogue entre promoteurs/investisseurs et utilisateurs, c’est la meilleure manière de remplir les nouveaux programmes immobiliers qui sortent de terre. Encore récemment, on voyait des promoteurs qui déployaient des immeubles avec des exigences très basses en matière d’isolation thermique, phonique, avec des systèmes d’aération et de climatisation dimensionnés au minimum. Ces immeubles-là ne répondront malheureusement jamais aux exigences des utilisateurs en matière d’expérience collaborateurs.
Vous avez démarré votre carrière dans l’informatique, qu’est-ce que cela vous a apporté ?
J’ai commencé ma carrière dans une petite usine pour déployer de nouveaux outils informatiques. Autrement dit, les nouvelles technologies de l’époque… J’y ai compris l’importance de l’accompagnement au changement, de ne pas parachuter des outils comme ça et d’expliquer aux gens ce que la machine fera pour eux, de rassurer sur le fait qu’elle ne les remplacera pas. Lorsque le travail à distance s’est imposé à nous pendant le confinement… c’était finalement le test « grandeur nature » du bon dimensionnement des réseaux informatiques, de notre stratégie de Smart Working débutée des années auparavant. 22.000 personnes se sont connectées simultanément. Tout a bien fonctionné. Ce qui paraissait impensable pour beaucoup de personnes, avant le covid, est devenu la norme.
Quelles sont les entreprises avec des cultures immobilières (et pas seulement) qui vous inspirent particulièrement ?
Ce sont celles qui ont compris l’importance du lieu de travail. Celles qui ont fait de l’immobilier un levier de transformation et qui ont aussi compris que donner du temps et de l’attention aux gens est vertueux pour tout le monde. Ce sont ces entreprises avec ‘un petit truc en plus’. Plus de 7% de nos collaborateurs sont en situation de handicap chez AXA France… et nous avons ouvert un Café Joyeux dans nos locaux. C’est un lieu hyper-plébiscité !
Et puis, il n’y a pas que nos immeubles ! Il y a ce qu’il y a autour. À Nanterre par exemple, nous avons aidé La Maison des Femmes à aménager un lieu en leur donnant du mobilier notamment. Ce lieu inspirant permet une prise en charge globale des femmes victimes de violences. À Val-de-Fontenay, on a fait la même chose avec la Maison des Migrants. On a aidé une association pour développer une oasis où ils peuvent venir se ressourcer... Avec les Bureaux du Cœur, on a lancé une expérimentation pour accueillir une personne sans domicile fixe dans une salle et l’accompagner pendant 6 mois avec un cadre de stabilité, de sécurité et d'intimité, au sein de locaux de l’entreprise. On va le déployer sur nos autres sites !
Finalement, le bureau devient la marque « citoyenne de l’entreprise » ?
Toutes ces initiatives créent de la fierté. Les entreprises qui montrent qu’elles sont citoyennes fidélisent leurs collaborateurs, font parler d’elles et attirent des talents. C’est indéniable ! Et pour les grandes entreprises comme Axa France, nous devons jouer notre rôle. On a lancé les ‘kids days’ pour que les collaborateurs puissent faire visiter leurs bureaux à leurs enfants. Ça cartonne. Tout ça n’a rien d’un gadget. C’est simplement se questionner sur ce que nous pouvons faire ‘de mieux’ dans nos espaces et notre environnement de travail.
Vous êtes amatrice d’art et de musique, quelle devrait être la place de la culture dans le monde de l’entreprise ? Dans les bureaux ? Dans la ville ?
La culture est primordiale dans tous communs. Il y a des entreprises qui proposent des locaux pour faire de la musique, de la peinture… quelle belle idée ! Parfois, on ne soupçonne pas les talents cachés de nos collègues. Chez Axa nous avons un club TEM « Talents en Mouvement » qui met en lumière des œuvres créées par les collaborateurs. Enfin, notre siège social est situé sur le périmètre de La Défense Seine Arche. C’est insuffisamment connu mais nous sommes au cœur d’un musée d’art contemporain à ciel ouvert. Nous avons organisé un tour avec nos équipes, guidé par un conférencier pour découvrir toutes les œuvres d’art que nous côtoyons au quotidien. J’invite toutes les entreprises de La Défense à faire de même.